Les soins externalisés constituent pour nous un problème de fond.
Nous en avons déjà parlé dans un précédent article en pointant l'aspect délétère des conditions de double prise en charge pour les salariés.
Nous souhaitons revenir ici sur le sujet en l'abordant sous un angle plus global.
Nous avons réalisé une vidéo, avec l'aide d'une juriste, afin d'ouvrir le débat plus largement, d'expliquer notamment en quoi c'est aussi un problème pour l'exercice libéral, et d'explorer
certaines questions connexes.
Dans cette vidéo vous trouverez :
- un point sur les établissements concernés, et les incertitudes résiduelles.
- un point sur la manière dont nous pouvons prendre en charge les patients concernés.
- notre vision des soins externalisés et les questions qu'ils soulèvent sur le fond.
- un point sur deux questions associées : le risque d'être en situation de refus de soins, et le risque de demandes d'indus par les caisses.
- nos choix concernant la manière d'appréhender ces situations.
Tous les liens vers les articles cités sont dans la description de la vidéo !
Nous avons publié la vidéo hier sur les réseaux sociaux et il apparaît que quelques questions persistent.
Quelques précisions :
- s'agissant de la continuité des soins, l'organiser ne signifie pas que c'est à l'orthophoniste de trouver quelqu'un pour effectuer les soins à sa place s'il ne le peut pas lui-même. Cela
signifie : donner au patient une ou plusieurs solutions pour que la prise en charge puisse avoir lieu. Attention à ne pas invoquer un motif illicite.
Il est à noter à ce sujet qu'invoquer un faux motif peut être considéré comme refus de soins illicite. Par exemple, si vous dites que vous n'avez pas de place ou que vous êtes incompétent pour
cette pathologie, alors que vous acceptez une prise en charge d'un autre patient non pris en charge en structure et/ou présentant les mêmes troubles, il sera difficile d'argumenter ensuite pour
contrer une accusation de refus de soins (et ce n'est pas très déontologique !).
- s'agissant dans ce contexte des listes de collègues vers qui orienter : il ne s'agit pas de faire une liste de ses collègues préférés ou même de faire une liste de collègues dont on sait qu'ils
pourront prendre en charge. Il s'agit de donner une liste exhaustive (question de confraternité !).
- s'il s'agit de signer une convention, il ne s'agit pas de signer n'importe quoi : une convention doit pouvoir vous satisfaire professionnellement, elle doit régir les conditions de financement
mais ne doit pas vous placer dans une condition de subalterne. Ce n'est pas, par exemple, à la structure de définir le nombre de séances requises, ni les méthodes ou techniques employées,
ceci est votre prérogative. Elle n'a pas à vous imposer des contraintes qui ne sont pas prévues dans les textes qui régissent notre profession. Vous ne l'accepteriez pas de qui que ce soit hors
conventionnement, il n'y a aucune raison pour que vous l'acceptiez d'une structure.
Une convention individuelle doit respecter notre Convention Nationale.
- vous pouvez négocier avec une structure concernant le contenu de la convention, mais il faut savoir que vous ne pouvez négocier les tarifs que si vous acceptez en parallèle que l'Assurance
Maladie ne prenne pas en charge vos cotisations sociales sur ces honoraires. Elle le fait de la même manière que pour les honoraires conventionnés (ceux reçus des patients, des caisses et
mutuelles) si et seulement si ils sont conformes à la NGAP. Notez qu'il y a fort peu de chances dans tous les cas que les structures acceptent de vous payer autre chose que ce qu'il y a dans
la nomenclature.
Voir Avenant 14 à notre Convention Nationale.
- concernant le refus de soins licite, il existe des obligations de refus de soins pour les soignants : incompétence, absence de nécessité médicale, refus de prescription constituant
une dépense injustifiée (principe d’économie compatible avec la qualité, la sécurité et l’efficacité des soins), refus de prise en charge dans des situations particulières répondant à des
conditions encadrées légalement (ex : personnes ne remplissant pas les conditions légales pour une IVG ou actes d’assistance médicale à la procréation).
Il est à noter que de très nombreux textes existent pour les médecins et infirmiers un sujet du refus de soins, mais que, les orthophonistes ne disposant ni d'un ordre ni d'un code de
déontologie, seule la loi générale peut être invoquée, les références déontologiques à ce qui se passe dans les autres professions de santé également (notamment déontologie médicale).
(nous mettrons à jour cette partie de l'article au fil des questions complémentaires, n'hésitez pas à nous les adresser)
MISE A JOUR 31/01/2017
Les choses évoluent rapidement. Depuis la publication de la vidéo, de nouveaux éléments sont portés à la connaissance des orthophonistes. Notamment un mail de la CNAMTS sur sa position concernant les CMP ne laisse plus de doute quant à l'existence effective d'une double PEC dans ce cas et donc l'impossibilité, hors convention individuelle, de travailler en libéral avec les patients qui y sont vus (la CNAMTS s'appuie sur l'article du code de la sécurité sociale que nous citons dans la vidéo : article L162.26).
Malgré cette position claire, des divergences sont toujours observées selon les départements, constituant de fait une inégalité d'accès aux soins des patients en fonction de leur lieu de
résidence.
Il semblerait que nos instances syndicales préparent actuellement une communication sur le sujet des doubles PEC, nous demeurons à l'affût de ces nouvelles.
Dans cette attente, voici notre infographie, modifiée selon la position de la CNAMTS.